À la Foire du livre de Brive, Gaël Faye évoque la possibilité, malgré tout, de la vie et de la beauté après le génocide
Gaël Faye (prix Renaudot 2024), accompagné par le guitariste Samuel Kamanzi a proposé, ce vendredi soir 8 novembre, au théâtre de Brive (Corrèze), une lecture de certains passages de son livre, entrecoupée de chansons. Un moment suspendu !
« Stella s’est précipitée dans le jardin, elle l’avait vue s’effondrer au sol, son ami, son enfance, son univers. Les hommes en machettes étaient sales, luisants, satisfaits d’eux-mêmes. Elle avait poussé un cri de terreur, avant de poser le genou dans l’herbe, la main pressée sur son ventre, le visage en feu. »
Un silence de cathédrale
Dans un silence de cathédrale, la guitare de Samuel Kamanzi accentue la beauté des mots, pleins de poésie et parfois d’horreur. Revêtus de douceur et de tristesse, ceux-ci cognent, font froid dans le dos, mais, font entrevoir aussi une lueur d’espoir.
Ce vendredi soir, sur la scène du théâtre de Brive, Gaël Faye a proposé une lecture musicale de certains passages de son second roman, Jacaranda, auréolé du prix Renaudot 2024.
Avant le spectacle, à l’extérieur, la queue s’étirait très, très loin. Il aurait fallu que le théâtre ait la capacité d’accueil d’une grosse salle de concert pour accueillir tous ceux qui voulaient voir et entendre l’artiste.
Comment raconter l’indicible ?
Comment raconter le génocide de plus de 800.000 Tutsis du Rwanda, le dernier du XXe siècle ? Décrire l’insoutenable et persistante odeur de la mort et le silence des survivants.
« L’hôpital est un bateau de nuit qui recueille l’Humanité du fond du gouffre, lit Gaël Faye. Les grands brûlés de l’effort de reconstruction, les éreintés de pressions familiales, les épuisés de conventions sociales, les déserteurs de la grande comédie humaine. Mais, il abrite surtout ces ombres qui s’excusent d’être encore, ces âmes errantes qui vivent dans les contrées sans lumière, coquilles humaines pleines de tourments et de cauchemars, impossibles à guérir. »
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Le dialogue et le pardon
Le romancier évoque les drames individuels de ce maudit mois d’avril 1994, que la folie des hommes a transformé dans le pays des Mille Collines en une saison de machettes.
Mais, il raconte aussi et surtout ces très nobles efforts de ceux qui, trente ans après, s’essayent au dialogue. Victimes et bourreaux apprennent à vivre ensemble. Les premiers accordent leur pardon aux seconds pour pouvoir vivre en paix. Pardonner, peut-être, oublier, jamais !
La lecture, entrecoupée des chansons, dont le magnifique Petit Pays, a été conclue par la chanson Chalouper. Comme un souffle de vie, qu’on n’arrêtera jamais.
Dragan Perovic
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