Pro D2 – Reportage : pour son retour en phase finale, Béziers a pris feu
Pour la première fois depuis 2011, la phase finale était de retour à Béziers. Un moment tant attendu par les fans et les joueurs héraultais, avec, en plus, une affiche alléchante : ASBH – CA Brive. Plongez dans les coulisses de cette folle rencontre.
Veille de match, sous les coups de 13h30, un soleil printanier illumine le ciel de Béziers. Quelques employés de la mairie s’affairent autour du stade Raoul-Barrière. Des Biterrois viennent se restaurer à la brasserie Chez Raoul pour profiter d’un repas avec une vue sur le stade. De repas, il n’en est pas encore question pour Maxime et Medy. Les deux jeunes hommes font partie de l’association de supporters Rugbiterre. Ils multiplient les allers-retours dans l’enceinte, vérifient que tout est prêt pour ce moment qu’ils attendent depuis des jours, des mois, des années. Ils ont entendu les aînés leur narrer tant de fois les années glorieuses de l’ASBH, les voyages à Paris presque chaque année pour une finale et ces Brennus ramenés si souvent sur le parvis du théâtre de la ville, sur les allées Paul-Riquet. Cette fois, ce sont eux qui vont vivre une phase finale de championnat à domicile, la première depuis la campagne victorieuse de Béziers en Fédérale 1, en 2011.
« Il y a une attente énorme, avoue Maxime Gil, secrétaire de l’association. Il y a la pression qui est montée toute la semaine, on veut montrer nos couleurs. On a envie que cela soit une belle fête ! » À l’instar des joueurs, les deux hommes et les autres bénévoles préparent ce match de barrages depuis la mi-mars, planchant sur une réception mais aussi sur un barrage joué à l’extérieur. Ils ont décidé de faire « une nouvelle animation ». Cela sera un nouveau tifo « 100 % fait à la main » réalisé avec des grands draps sur lesquels des dessins et de la peinture ont été faits. Il fera vingt mètres de large et quinze mètres de haut, soit 300 mètres carrés, cinq jours de travail et une dizaine de bénévoles mobilisés sur des jours de repos, des week-ends et des jours fériés. Maxime est lui-même descendu de Paris où il travaille pour ce match.
Medy salive d’avance en pensant à ce barrage dans un stade plein après une saison démarrée avec un peu plus de 3 000 personnes face au SAVX. « On bosse toute l’année pour faire des animations et si tout fonctionne bien demain, ça sera beau à voir », termine-t-il. Les deux hommes ferment le local des supporters et prennent congé.
Un maillot collector
Plus qu’à l’accoutumée, il y a de l’agitation au stade Raoul-Barrière. Et encore un peu plus vers 17h, quand les joueurs arrivent pour la mise en place. Ils viennent garer leur véhicule au fur et à mesure sur le parking du stade, passent aux vestiaires se changer et pénètrent sur la pelouse, détendus, avec le sourire. Des fidèles supporters sont présents dans les gradins pour voir les derniers réglages et glisser un mot d’encouragement aux Biterrois. Jean-Michel Vidal est au bord de la pelouse, échange avec les entraîneurs, son directeur sportif Benjamin Bagate et avec plusieurs partenaires invités à suivre cet entraînement du capitaine autour d’un jus de fruit.
Le co-président de l’ASBH, s’éclipse quelques minutes pour nous présenter en avant-première une pièce collector. Pour célébrer la qualification, un maillot spécial a été créé. La mention « phase finale 2023-2024 » est inscrite en lettres d’or. Les motifs sont différents. Les noms des joueurs sont inscrits dans le bas du dos. Les onze étoiles sont bien présentes. « Les autres maillots arrivaient en fin de vie donc il allait falloir les changer », explique Jean-Michel Vidal. Michael Guedj, l’autre co-président de l’ASBH, est le directeur de l’équipementier Shilton. « Il a fait du bon travail », juge son partenaire à la présidence du club. Seules cent pièces seront disponibles à la vente le jour du match, à la boutique officielle.
Gérer la nouvelle tenue n’a pas été la seule préoccupation dans les bureaux du club durant la semaine. Accueillir un barrage est truffé de contraintes. « On avait déjà eu un aperçu contre Nevers avec presque 13 000 spectateurs donc nous sommes rodés, reprend Jean-Michel Vidal. Mais là, le maître d’œuvre général est la LNR. Il y a des paramètres que nous ne connaissions pas. C’est la Ligue qui gère la billetterie. La panneautique, il faut la modifier pour mettre en valeur leurs partenaires. Mais écoutez, ces soucis, nous sommes heureux de les avoir ! »
On a deux raisons de gagner : ce put*** de stade qui sera plein ! Et ce groupe qui le mérite
En font, une enceinte pilotée par Tim Nanaï-Williams et Otunuku Pauta crache du rap, accompagnant le foot fait en guise d’échauffement. Gabin Lorre ne manque jamais une occasion de montrer ses talents avec un ballon, même s’il est rond. L’arrière se régale dans une partie où ça se chambre au milieu des rires. Le sérieux reprend ensuite avec un peu de physique pour ceux qui en sont demandeurs, avant la mise en place. À l’issue de celle-ci, les avants font des touches, quand Gabin Lorre et Samuel Marques se toisent à celui qui passe le plus de drops. « J’affectionne ce geste technique, lance, avec le sourire, celui qui en a déjà réussi quatre cette saison. Je me chambre avec Sam, je n’arrive pas à le dépasser à l’entraînement. Pierre Caillet m’a dit de le bosser ce geste, que cela pourrait servir. » Alors, en cas de possibilité à la 79e qui du demi de mêlée ou de l’arrière pour claquer un drop victorieux ? « Il ne m’en voudra pas si je le prends, rigole le joueur de 22 ans. Il n’en a pas réussi un de la saison mais s’il a une occasion je pense qui le fera. » Spoiler, les deux en manqueront un face au CAB sur des tentatives (très) lointaines. Mais insouciance ou pas, le joueur aux treize essais cette saison dégage plus d’excitation que d’appréhension. Il rappelle qu’il a déjà joué des phases finales en Juniors avec Pézenas, bien que cela soit différent. « Mais je le prends pareil », assure-t-il. Clément Ancely, biterrois de naissance et de formation, capitaine après être revenu au club à l’intersaison reste calme, concentré, comme Chico Fernandes, au club depuis 2011.
« Pourquoi se rajouter de la pression, questionne son entraîneur Pierre Caillet ? On est allé se chercher ce moment. On a juste envie de le vivre. Il peut y avoir la peur d’être moins bon que le mec en face mais par rapport au contexte, ça ne rajoute pas de pression, on a envie de le vivre, ça va être génial. Le public sera un avantage. On a deux raisons de gagner : ce put*** de stade qui sera plein ! Et ce groupe qui le mérite. » Ce groupe, justement, ne va pas se lâcher, avec une mise au vert. « C’était une demande de ceux qui ont déjà joué les phases finales, lâche Gabin Lorre, citant les très expérimentés Gunther, Ancely, Malié ou Marques à l’origine de ça. Les jeunes, on ne connaît pas trop cela, on pensait arriver comme d’habitude à 15h, 16h au stade. Tout le monde a adhéré, les coachs aussi. De la mise en place au match on va rester dans cette bulle-là. » Cette bulle commence par un repas à la brasserie La Coupole avant de mettre le cap de l’autre côté de la frontière, à Narbonne, pour passer la nuit au château Capitoul.
Tifo, jambon et haie d’honneur
« Quelqu’un à un ciseau ? » « Amène-moi du scotch s’il te plaît ? » « Vous trois, venez avec moi, on va monter ça en tribunes ! » Le coup d’envoi de la rencontre est dans trois heures et trente minutes. Mais la vingtaine de bénévoles de Rugbiterre s’active. Il faut fignoler le fameux tifo fait à la main, préparer le stand maquillage, sortir les kits de supporter – un bob, un éventail et un bandana – qui seront mis à la vente… C’est la course. Medy, polo de Rugbiterre, short et chaussettes de l’ASBH, a mis du maquillage rouge et bleu sur ses cheveux rasés de près. Il coordonne la mise en place des tifos. Il faut les porter dans les tribunes sous un soleil de saison et les placer, dans le bon sens. « Les gars, c’est la partie rouge qui doit être là, pas la bleue. » À côté d’eux, les deux tifos de l’association de supporters des Brennus sont déjà installés. « Il faut s’y prendre à l’avance car il y a un peu de boulot. Le soir il y a du monde donc c’est plus compliqué. Donc on vient en fin de matinée. C’est ma routine d’avant-match », explique son président Thierry Rouanet. Il avait aussi mis en place les animations qu’il propose aux enfants. Le maître-nageur de profession a hâte d’y être : « Ce soir, les animations auront encore plus de sens car le stade sera plein. Les autres années, quand il y avait 4 000 spectateurs, dans un stade aussi grand, ça sonnait creux. C’est une coquille donc il faut qu’elle soit pleine… » Pendant ce temps, les membres de la sécurité, en réunion, rejoignent leur point d’assignation ; les débits de boissons sont prêts ; les jambons commencent à cuire à la broche.

18h30, les portes s’ouvrent. Une longue queue se met en place devant la boutique pour se procurer un des cent maillots phase finale 2024. Thierry Rouanet lance ses ateliers. Les premières bières et barquettes de frites sont servies aux supporters arrivés bien en avance. 5 000 applaudisseurs et 1 000 petits ballons sont distribués par le club. Devant le stade, les 2 000 Corréziens marchent en cortège pour aller accueillir leurs protégés scandant des « Tous ensemble CAB ». Côté biterrois aussi on s’organise. Une haie d’honneur sur plus d’une centaine de mètres est organisée. Tout du long, les joueurs fendent une foule rouge et bleue, marchent au milieu des fans qui les encouragent, leur adressent une tape sur l’épaule et chantent à la gloire du club. Un moment fort en émotion et un sacré shot de motivation pour les 46 acteurs de cette rencontre.

L’heure tourne, la pression monte, les gradins se remplissent. Les Brivistes sont sifflés quand leur échauffement empiète le camp biterrois. Les joueurs de l’ASBH, justement, passent derrière les panneaux publicitaires pour longer la tribune de face avant de rentrer aux vestiaires. C’est un clin d’œil au dernier match de phase finale au stade Raoul-Barrière en 2011, une demi-finale de Fédérale 1 contre Tyrosse. Du côté des Brennus, comme de Rugbiterre, chacun prend sa place afin de pouvoir monter les tifos. « C’est deux mois de boulot pour 30 secondes de rendu, une minute peut-être. Mais on espère pour les joueurs que le rendu sera sympa », lâche Maxime Gil. « Je ne sais pas à combien tape le palpitant, on a les poils qui se dressent c’est impressionnant un stade rempli comme ça ! Il faut savourer, apprécier chaque minute », lance Thierry Rouanet, les supporters lançant au même moment un « Aquí es Besièrs ».

Un match fou
C’est dans un stade chauffé à blanc depuis plusieurs minutes, et avec plusieurs tifos devant eux, que les joueurs pénètrent sur la pelouse. Le ton est très vite donné, tant sur le terrain qu’en tribunes. Les premières charges d’Asaeli Tuivuaka permettent aux aficionados du CAB de se faire entendre, dans les deux tribunes adjacentes où ils se situent. Les supporters du CAB ont trois noms prestigieux qui soutiennent leur cause : Setariki Tuicuvu, ancien de la maison, Leicester Fainga’anuku et Jiuta Wainiqolo. Avec la grosse défense des Coujoux et les mêlées dévastatrices des hommes de Pierre-Henry Broncan des « Ici c’est la Corrèze » se font entendre vite repris par les sifflets du reste du stade rappelant en occitan qu’ici c’est Béziers. « C’est chaud dans les tribunes, on essaye de créer une ambiance hostile mais bon enfant, sans insultes. Les Brivistes sont en nombre et font du bruit. On répond par des chants, c’est sympa. Le match est âpre sur le terrain mais aussi en tribunes », analyse Maxime Gil retrouvé à la mi-temps.

À la 55e, le match est déjà irrespirable, tant sur le terrain qu’en tribune. Béziers mène 26-25 mais chaque action peut faire basculer la rencontre. Gabin Lorre le sent et chauffe le public après une bonne action défensive. Ce même public qui accompagnera le premier échec de Tom Raffy d’un « il va la manquer ». L’ouvreur de Brive se vengera deux minutes plus tard, le même refrain pourtant en fond. Dans ce match au couteau, il fallait un exploit individuel. Il viendra d’un Charly Malié slalomant entre un Daniel Brennan essoufflé, un Briviste monté trop vite et un M. Nuchy placé entre les deux Corréziens. Hans Nkinsi conclut cette action longue de quatre minutes en marquant cet essai du bout de l’Hérault. Le stade Raoul-Barrière explose. La transformation salvatrice de Samuel Marques est célébrée comme un pénalty marqué dans un stade de foot (33-31). Ne reste plus qu’à la défense biterroise à tenir. Béziers jouait à un de moins sur l’action amenant à l’essai à cause du carton jaune écopé par Jon Zabala. « Béziers joue désormais à un de plus », souffle un collègue journaliste en faisant référence au seizième homme plus que jamais au soutien des siens.

Ultime percée briviste, la sirène retentit. En-avant du CABCL, Hans Nkinsi, encore lui, récupère la balle pour l’envoyer hors des limites d’un coup de pied peu académique. Le public exulte, des feux d’artifice sont tirés. Problème : Monsieur Nuchy souhaite revoir un plaquage de Taleta Tupuola. Cela sera sous les huées des supporters biterrois. Rien ne sera trouvé à redire, fin du match, la vraie cette fois-ci. « C’est dommage de s’être arrêté que sur le plaquage légal de Tupuola. Le dernier ruck est trop important. On doit savoir s’il y a faute ou non », regrette Pierre-Henry Broncan.

Béziers en fête
Malgré les avertissements du speaker pour éviter des sanctions au club, une centaine de personnes, majoritairement des jeunes, ne peut s’empêcher d’envahir la pelouse. Les « Aquí es Besièrs » s’enchaînent, comme les « Aller les Rouge et Bleu » et les « On est en demi ». Deux « Aux armes » sont mêmes lancés. Joueurs comme supporters de l’ASBH ne peuvent pas s’arrêter de communier. Les Brivistes, eux, remercient un public plus qu’à la hauteur de l’événement. « On est passé par tous les états ! Il y a eu une ambiance dans ce stade… Chapeau aux Brivistes qui ont fait du bruit. Mais le peuple biterrois a une telle passion pour le rugby », lâche, à la volée, Thierry Rouanet en décrochant une banderole.

Pendant que certains sont obligés de se soustraire aux obligations de la conférence de presse, Pierre Gayraud et Gillian Benoy, encore en tenue de match, filent en tribune de face pour chanter, danser et boire quelques bières avec les supporters. Ils ne refusent aucune des nombreuses demandes de photo de la part des supporters, ravis. « Un grand merci aux gens qui viennent au stade. Ce soir, c’est toute une ville qui a remporté ce match. C’était exceptionnel ! J’ai joué dans beaucoup de clubs mais j’ai rarement vu une telle ambiance. Les supporters nous ont soutenus et ont cru en nous jusqu’au bout. Ce match face à Nevers, il y a deux semaines, nous a énormément servis. On avait gagné à la 82e et on s’est rendu compte qu’on pouvait renverser des montages, à l’image de cet essai marqué à quatorze ce soir », s’exclame, pendant ce temps-là Samuel Marques face aux caméras. Puis vient le tour de Clément Ancely et d’Hans Nkinsi de répondre aux questions des journalistes, avec, face à eux, un Gabin Lorre qui tente de les déconcentrer avec des grimaces. Les deux hommes, coéquipiers chez les jeunes avant de s’exiler puis de revenir l’été dernier ne cachent pas leur bonheur mais aussi leur satisfaction et leurs ambitions. Ils exhortent aussi à profiter de la soirée. Ils rejoindront d’ailleurs, eux aussi, la tribune de face pour se joindre aux célébrations.
Pierre Caillet souhaite un peu de calme et de repos après cette folle rencontre très forte en émotion. Nombre de joueurs et membres du staff monteront à la bodega partager un moment avec les supporters, leurs proches, et une flopée d’anciens de l’ASBH croisée au stade – Thomas Acquier, Morad Touizni, Vitolio Manukula, Jarrod Poï ou Thomas Zénon pour ne citer qu’eux. Certains prolongeront ce moment de bonheur en descendant à la boîte de nuit L’Usine à Gaz où même quelques maillots de Brive se sont mélangés à cette liesse biterroise.
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