Organisateur du festival de Turenne et expert international, Nicolas Teindas, une vie entre la Corrèze et le Zambèze
Il fait partie de ces hommes qui possèdent un don de plus en plus rare de nos jours, celui de l’écoute. Un savoir être qui requiert du temps, de la patience, de l’attention, et surtout… l’amour de l’autre. Cette qualité lui vient peut-être de son grand-père maternel et de son père, tous les deux médecins de campagne (à Estival pour le premier et à Cressensac pour le second), qui ont pratiqué leur métier comme un sacerdoce et consacré leur vie à soigner corps, cœurs et âmes, à l’écoute de leurs patients en tant qu’amis, confidents ou travailleurs sociaux.
Un festival avec 10.000 € de budget
Depuis 2007, épaulé par une bande d’amis parisiens, chanteurs amateurs, Nicolas Teindas organise un festival de chanson française, Notes d’une vallée d’été, d’abord à Estival, son village d’enfance, puis, à Turenne. Avec un objectif simple et noble : chanter, jouer de la musique, faire plaisir et se faire plaisir. « Au début, c’était vraiment très artisanal. On logeait chez mes parents dans de grandes tentes militaires, louées pour l’occasion » se souvient-il. « Maintenant, les copains arrivent dès le mercredi, pour passer une semaine en Corrèze, en commençant leur séjour par le marché de pays de Chartrier-Ferrière. »
Son festival enrichit toujours le paysage culturel corrézien… avec un budget de 10.000 € ! Dans la petite église d’Estival, Nicolas Teindas a notamment fait venir Anne Sylvestre, comme la chanteuse malienne, Pamela Badjogo. Cette année, à la Grange Rouge de Turenne, c’est le trio Lou Casa qui a enchanté les spectateurs avec son spectacle consacré à Brel et Barbara.
« Ce qui me plaît, c’est la relation privilégiée avec les artistes, cette alchimie qui se crée avec le public, renouvelée depuis 17 ans. C’est très nourrissant ».
Nicolas Teindas
Deux points pour un équilibre parfait
Sur la mappemonde de son cœur, la Corrèze et l’Afrique sont deux points qui assurent un équilibre parfait. En ce moment, Nicolas Teindas se prépare à partir en République démocratique du Congo. « J’y resterai jusqu’en janvier 2024, en tant que chef de mission d’observation des élections présidentielles du 20 décembre, pour la Fondation Carter (créée par l’ancien président des États-Unis, Jimmy Carter, N.D.L.R.). » Quelle sera sa mission sur place ? « S’assurer que les élections sont libres et transparentes. »
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Les couleurs et les odeurs du Mali
Ces dernières années, ses missions d’expert électoral pour l’Organisation internationale de la francophonie, expert légal pour l’Union européenne ou consultant pour le ministère des Affaires étrangères, l’ont mené en République démocratique du Congo, au Mali, en Centrafrique, comme au Bénin ou au Zimbabwe, en Guinée ou au Niger… La liste de pays, africains ou autres, dans lesquels il a effectué des missions depuis 2004 est tellement longue que, pour les retracer, son CV fait sept pages.
À l’origine de ce lien fort, un premier voyage en Afrique avec ses parents. « Mon père prenait des congés pour aller travailler bénévolement dans les dispensaires au Sénégal et au Bénin. Quand tu as 14 ans, tu arrives à l’aéroport et tu vois une jeune fille de ton âge qui fait la manche et qui a une seule main, parce que l’autre a été emportée par la lèpre, ça marque. »
C’est le Mali, le pays africain auquel il est le plus attaché. Quels souvenirs il en garde, après trois ans passés sur place entre 2013 et 2015 ? « La musique, les odeurs, les couleurs et une vie qui fourmille partout, répond-il. »
« Le Mali est un pays immense. Dans le cadre de mon travail, j’ai eu la chance de pouvoir aller avec l’ONU à Tombouctou ou à Gao, à une époque où ces zones étaient déjà fermées aux touristes. Au pays Dogon, c’était triste de voir tous ces gens qui vivaient du tourisme depuis des décennies, se retrouver sans rien. »
Nicolas Teindas
Il fait sa part !
Pour rendre le monde un peu meilleur, tous les jours Nicolas Teindas fait sa part. « J’étais et je reste toujours idéaliste. Parce que quand on fait ce travail, on peut vite devenir cynique. À une époque, je travaillais pour une ONG américaine avec un budget de plusieurs millions de dollars. À Sikasso (la ville malienne jumelée avec Brive N.D.L.R.), j’ai collaboré avec les associations de jeunes, de femmes, on faisait de l’éducation civique. Ça a marché et on a pu suivre l’évolution de ces gens sur trois ans. Pour certains d’entre eux, ça a changé leur vie. Je crois beaucoup à ces petits projets derrière lesquels on voit des visages. »
L’expert électoral a sillonné l’Afrique, pour mieux revenir à sa terre corrézienne à laquelle il est viscéralement attaché.
« C’est parce qu’on a des racines qu’on peut voyager loin. Quand je me lève un matin d’hiver pour voir le brouillard se lever au-dessus de Curemonte, ça me prend toujours aux tripes. »
Nicolas Teindas
Un monde qui disparaîtNicolas Teindas et le photographe, Sylvain Marchou, ont cosigné le livre « Un jour la terre, la vie
des hommes et des femmes du Causse ». Une exposition de photos, issue de cet ouvrage, présentée au château de Sédières tourne toujours en Corrèze et dans le Lot.
Avec le photographe Sylvain Marchou, en 2018, Nicolas Teindas a publié un album de textes et de photos, Un jour la terre, la vie des hommes et des femmes du Causse, préfacé par Pierre Bergounioux. Ce livre est « le portrait d’une génération, d’hommes et de femmes attachés à leurs terres caillouteuses et dont les saisons rythment l’existence. » Il recèle une trentaine de visages et de témoignages de vieux paysans, comme autant d’éclats lumineux d’un monde qui est en train de disparaître sous nos yeux. Une des photos de Sylvain Marchou du livre, Un jour la terre, la vie des hommes et des femmes du Causse.
« On a pu entrer dans les cours de fermes grâce à mon père. Le projet a commencé en 2012 et il a duré sept ans. » Une suite de cet ouvrage est en préparation. « Émotionnellement, c’est fort, ça prend beaucoup d’énergie, mais, c’est très beau. La semaine dernière, une dame âgée de 80 ans m’a dit : “Moi, j’ai été abandonnée à la naissance”. Elle a été recueillie par des gens qui l’ont fait trimer comme une malade. À 12 ans, elle bossait déjà comme une adulte. »
Le courage des femmes
Qu’est-ce qui l’a le plus marqué pendant le travail sur ce projet ? « Les rencontres avec des femmes. Tous les paysans qu’on a interviewés entre 2012 et 2018 ont commencé leur récit par la guerre, parce qu’ils l’ont tous connue. À l’époque, les hommes sont au front et les femmes restent à la ferme et font tout. On a donné la parole à ces dernières, dont certaines étaient à leur manière des féministes avant les années soixante-dix. On dit à tort que les paysans sont des gens taiseux. C’est juste parce qu’on n’est pas allés les voir, c’est tout. »Nicolas Teindas et Sylvain Marchou sont allés à la rencontre d’un monde paysan qui disparaît. Photo : Sylvain Marchou
Nicolas Teindas nuance : « Ce sont des gens bien ancrés dans l’actualité. À Chartrier-Ferrière, un vieux monsieur avait aussi son mot à dire, assez pertinent d’ailleurs, sur la conquête de l’espace ou l’homoparentalité. »
L’Afrique, un champ de batailles géostratégiques
En 2013, Nicolas Teindas s’expatrie au Mali, à Bamako, pendant trois ans, en tant qu’expert électoral, puis, il effectue une mission de deux ans en Centrafrique. « J’ai vu l’arrivée des premiers mercenaires Wagner en Centrafrique en 2017. Avec un groupe d’experts, on savait que tôt ou tard, ils allaient arriver au Mali et que ç’allait être beaucoup plus dévastateur. »
Aujourd’hui, plus que jamais, l’Afrique est un champ de batailles géopolitiques, notamment entre la Russie et l’Occident. « Les Russes et les Chinois n’ont pas été pris au sérieux, comme tous les nouveaux acteurs, l’Inde, la Turquie ou le Qatar », constate-t-il.
Huit coups d’états depuis 2020
Pourquoi la démocratie a tant de mal à s’installer sur ce continent, alors que la décolonisation est déjà loin ? « Dans toute l’Afrique, il n’y a qu’un seul pays, le Botswana, qui n’a pas connu un système autoritaire, dictatorial ou un parti unique, répond Nicolas Teindas. Pendant très longtemps, dans la grande majorité de pays africains, c’était “un parti, une nation, un état”. S’y ajoute une corruption endémique, liée à la richesse des sous-sols. »
Les coups d’État s’enchaînent (déjà huit, depuis 2020), avec un scénario plus ou moins différent. « Ce qui se passe au Niger ou au Gabon, risque malheureusement d’arriver aussi en Côte d’Ivoire, au Bénin ou au Sénégal », conclut le Corrézien.
Dragan PEROVIC
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